dimanche 13 septembre 2009

L’air du temps…

L’automne arrive. Les avenues bordées d’arbres sont jonchées de ronds et luisants marrons. Ces changements de temps avaient une grande influence sur la vie quotidienne dans la Pologne de ma jeunesse. Une belle chanson sur l’amour „Kochany, kochany, lecą z drzewa jak dawniej kasztany” (Mon chéri, les marrons tombent des arbres comme jadis) retentissait sur les ondes de la radio, faisant vibrer des cordes sensibles. Des sentiments forts mais cachés appelaient à l’intimité – nos amoureux allaient abriter leur passion sentimentale dans un hôtel, où le concierge âgé et souriant leur confiait une clé.

Au Théâtre Libre d’Antoine, le mot-clé était « la simplicité ». Cette façon de jouer sur scène nous a été inculquée pendant quatre années d’études à l’École Théâtrale (le Conservatoire). Je me souviens qu’il était difficile, étant jeune, de se rendre compte si les artistes qui jouaient alors sur scène amplifiaient exagérément leurs sentiments. Dans l’air de ce temps, il était normal de mettre en valeur les mots sur scène en les susurrant, de les célébrer. Mais je dirais aujourd’hui que certains de mes maîtres et de ceux qui étaient mes modèles sur scène, jouaient d’une façon plutôt maniérée.

Jeter les mots comme ils viennent – retombée assez fréquente de l’amateurisme sur scène – ce qui peut passer devant un public habituellement passif, n’était pas encore en vogue. Le style de jouer comme au cinéma n’était pas encore répandu. On n’admettait pas que les mots ne soient qu’à peine prononcés. On se serait aussi opposé à une grande liberté en matière de décors ou d’expression plastique, ou à l’emploi de costumes modernes dans des pièces classiques.

Quelques artistes formés à l’école traditionnelle continuent à privilégier un théâtre travaillé, bien mis en scène. Mais au fond ? Aller au théâtre n’a-t-il pas un sens que si la pièce en vaut la peine ? Et la mise en scène ? Il faut certes reconnaître que la perpétuelle recherche d’une innovation gratuite de l’expression dramatique rebute bien des gens et leur enlève envie d’aller au théâtre. Toute formée à l’école ancienne que je suis, j’aime pourtant aller aussi voir des pièces travaillées sous la direction de Krzysztof Warlikowski, de Krystian Lupa ou de Grzegorz Jarzyna. Ils gardent le professionnalisme et l’exigence. Et leurs interprètes – des acteurs contemporains – jouent sans maniérisme.

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